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{{NavChap|[[Chapitre IX - Solitude]]|[[Chroniques de la Première Croisade#Table des matières|Table des matières]]|[[Chapitre XI - La génération des miracles]]}}
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Assis confortablement sur son fauteuil en cuir de rendor, les coudes posés sur son magnifique bureau en bois massif, Tiralion Nebius lisait le dernier rapport transmis par l’un de ses contremaîtres. Si la guilde gagnait en productivité année après année, les conditions de travail des ouvriers s’étaient beaucoup dégradées. Certes, il était plus rentable de continuer ainsi, quitte à dédommager gracieusement les familles des victimes. Mais s’il voulait continuer à recruter de jeunes Fyros pleins d’entrain, il devait leur assurer que la mort ne se trouvait pas nécessairement au bout du tunnel. Car Tiralion Nebius, comme son père avant lui, était le chef de la guilde minière des Têtes de Pioches, l’une des plus grandes et riches guildes de l’Empire Fyros.
 
Assis confortablement sur son fauteuil en cuir de rendor, les coudes posés sur son magnifique bureau en bois massif, Tiralion Nebius lisait le dernier rapport transmis par l’un de ses contremaîtres. Si la guilde gagnait en productivité année après année, les conditions de travail des ouvriers s’étaient beaucoup dégradées. Certes, il était plus rentable de continuer ainsi, quitte à dédommager gracieusement les familles des victimes. Mais s’il voulait continuer à recruter de jeunes Fyros pleins d’entrain, il devait leur assurer que la mort ne se trouvait pas nécessairement au bout du tunnel. Car Tiralion Nebius, comme son père avant lui, était le chef de la guilde minière des Têtes de Pioches, l’une des plus grandes et riches guildes de l’Empire Fyros.
  
Tout commença en 2432, sous le règne du sharükos Abylus, l’Empereur du peuple fyros, lorsque des mineurs découvrirent accidentellement de mystérieuses ruines dans les Primes Racines. Encouragés par cette découverte, le peuple fyros entreprit des chantiers de fouilles archéologiques partout dans le Désert, et de plus en plus profondément. Malheureusement, deux ans plus tard, un gigantesque incendie se déclara dans les Mines d’Ambre de Coriolis et embrasa les territoires desséchés environnants. Le feu s'étendit rapidement aux territoires homins, ravageant la ville de Coriolis, et formant une traînée ardente jusqu'aux grandes forêts des Matis. L’incendie fit rage des semaines durant, coupant le gigantesque aqueduc alimenté par des éoliennes qui reliait le Désert à la région des Lacs. L’Aqueduc, dont la construction avait débuté en 2289, symbolisait l’alliance commerciale et militaire qui unissait les deux peuples : l’Empire s’engageait à protéger la Fédération de Trykoth, qui fournissait en échange de l’eau en abondance au peuple fyros ''via'' la Route de l’Eau. L’essor de l’Empire Fyros devait beaucoup à l’Aqueduc et à sa route commerciale. Accusant les mineurs fyros d’être responsables de cette catastrophe, l'Empereur en profita pour placer les guildes de mineurs sous juridiction impériale et pour élaborer le Code des Mines, supposé renforcer les droits des mineurs et les devoirs des chefs de guilde. Malheureusement, de nombreuses guildes durent mettre la clé sous la porte, trop impactées par les implacables nouvelles lois. La majorité s’y plia cependant, et cela même s’il n’était désormais plus possible de financer des fouilles ambitieuses, car jugées trop risquées. La crise atteignit son paroxysme lorsque Pyto succéda à son père Abylus, emporté par la maladie. Durant cette triste période, le tyrannique sharükos Pyto dilapida les économies de l’Empire, déjà bien malmenées par l’application du Code des Mines. Conscient des risques que Pyto faisait prendre à son peuple, son frère cadet Thesop essaya de lui faire entendre raison, et de le guider vers le droit chemin. Malheureusement, le fier Empereur Pyto ne voulut rien entendre. Ainsi s’écoulèrent deux années difficiles, où beaucoup virent la fin de l’Empire approcher. Mais, alors que l’on croyait l’espoir perdu à jamais, Thesop défia en duel son frère, qui accepta, et y perdit la vie. C’est ainsi que, comme le veut la tradition impériale, Thesop prit le pouvoir en 2440. Durant les années qui suivirent, le nouveau sharükos s'évertua à renflouer les caisses impériales et à abroger les lois liberticides promulguées par son défunt père. Ainsi débuta le règne de Thesop le Bâtisseur. Et c’est donc à cette époque que le père de Tiralion Nebius fonda la guilde des Têtes de Pioches, profitant de l’abolition du Code des Mines pour lancer un gigantesque projet minier et répondre au désir de Vérité enfoui dans le cœur de chaque Fyros, et que ses prédécesseurs n'étaient pas parvenu à étouffer.
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Tout commença en 2432, sous le règne du sharükos Abylus, l’Empereur du peuple Fyros, lorsque des mineurs découvrirent accidentellement de mystérieuses ruines dans les Primes Racines. Encouragés par cette découverte, le peuple Fyros entreprit des chantiers de fouilles archéologiques partout dans le Désert, et de plus en plus profondément. Malheureusement, deux ans plus tard, un gigantesque incendie se déclara dans les Mines d’Ambre de Coriolis et embrasa les territoires desséchés environnants. Le feu s'étendit rapidement aux territoires homins, ravageant la ville de Coriolis, et formant une traînée ardente jusqu'aux grandes forêts des Matis. L’incendie fit rage des semaines durant, coupant le gigantesque aqueduc alimenté par des éoliennes qui reliait le Désert à la région des Lacs. L’Aqueduc, dont la construction avait débuté en 2289, symbolisait l’alliance commerciale et militaire qui unissait les deux peuples : l’Empire s’engageait à protéger la Fédération de Trykoth, qui fournissait en échange de l’eau en abondance au peuple Fyros ''via'' la Route de l’Eau. L’essor de l’Empire Fyros devait beaucoup à l’Aqueduc et à sa route commerciale. Accusant les mineurs fyros d’être responsables de cette catastrophe, l'Empereur en profita pour placer les guildes de mineurs sous juridiction impériale et pour élaborer le Code des Mines, supposé renforcer les droits des mineurs et les devoirs des chefs de guilde. Malheureusement, de nombreuses guildes durent mettre la clé sous la porte, trop impactées par les implacables nouvelles lois. La majorité s’y plia cependant, et cela même s’il n’était désormais plus possible de financer des fouilles ambitieuses, car jugées trop risquées. La crise atteignit son paroxysme lorsque Pyto succéda à son père Abylus, emporté par la maladie. Durant cette triste période, le tyrannique sharükos Pyto dilapida les économies de l’Empire, déjà bien malmenées par l’application du Code des Mines. Conscient des risques que Pyto faisait prendre à son peuple, son frère cadet Thesop essaya de lui faire entendre raison, et de le guider vers le droit chemin. Malheureusement, le fier Empereur Pyto ne voulut rien entendre. Ainsi s’écoulèrent deux années difficiles, où beaucoup virent la fin de l’Empire approcher. Mais, alors que l’on croyait l’espoir perdu à jamais, Thesop défia en duel son frère, qui accepta, et y perdit la vie. C’est ainsi que, comme le veut la tradition impériale, Thesop prit le pouvoir en 2440. Durant les années qui suivirent, le nouveau sharükos s'évertua à renflouer les caisses impériales et à abroger les lois liberticides promulguées par son défunt père. Ainsi débuta le règne de Thesop le Bâtisseur. Et c’est donc à cette époque que le père de Tiralion Nebius fonda la guilde des Têtes de Pioches, profitant de l’abolition du Code des Mines pour lancer un gigantesque projet minier et répondre au désir de Vérité enfoui dans le cœur de chaque Fyros, et que ses prédécesseurs n'étaient pas parvenu à étouffer.
  
En effet, depuis toujours, le peuple fyros était obsédé par les profondeurs de l'Écorce. Creusant sans discontinuer malgré les interdits de la Karavan, les Fyros étaient à la recherche de Fyrak le Grand Dragon, l’entité maléfique qui, d’après le mythe, aurait amené les homins sur Atys, un monde désertique, glacial et obscur, afin de les réduire en esclavage. Selon ce même mythe, Jena, la Déesse de l’Astre du Jour, eut vent de la perfidie de Fyrak, et provoqua la Poussée Verte, afin de transformer Atys en un monde luxuriant et lumineux, et de piéger le Grand Dragon dans ses entrailles, libérant ainsi les homins de son joug. Vaincu par la déesse Jena, Fyrak réussit néanmoins à marquer Atys de son empreinte, et les cendres issues de son souffle enflammé s’incrustèrent partout, des lignes de l’écorce primordiale en passant par l’air et les cellules de chaque être vivant. Des cendres draconiques qui contenaient en elles les restes de la colère de Fyrak, et qui permettaient aux homins de manipuler la Sève et donc de réaliser des exploits magiques. Seuls les agents de la Karavan, protégés par leurs armures bénies par Jena, ne furent pas contaminés.
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En effet, depuis toujours, le peuple Fyros était obsédé par les profondeurs de l'Écorce. Creusant sans discontinuer malgré les interdits de la Karavan, les Fyros étaient à la recherche de Fyrak le Grand Dragon, l’entité maléfique qui, d’après le mythe, aurait amené les homins sur Atys, un monde désertique, glacial et obscur, afin de les réduire en esclavage. Selon ce même mythe, Jena, la Déesse de l’Astre du Jour, eut vent de la perfidie de Fyrak, et provoqua la Poussée Verte, afin de transformer Atys en un monde luxuriant et lumineux, et de piéger le Grand Dragon dans ses entrailles, libérant ainsi les homins de son joug. Vaincu par la déesse Jena, Fyrak réussit néanmoins à marquer Atys de son empreinte, et les cendres issues de son souffle enflammé s’incrustèrent partout, des lignes de l’écorce primordiale en passant par l’air et les cellules de chaque être vivant. Des cendres draconiques qui contenaient en elles les restes de la colère de Fyrak, et qui permettaient aux homins de manipuler la Sève et donc de réaliser des exploits magiques. Seuls les agents de la Karavan, protégés par leurs armures bénies par Jena, ne furent pas contaminés.
  
Pour autant, malgré les pouvoirs octroyés par les cendres draconiques, que le peuple Zoraï nommait aussi particules spirituelles, la plus grande ambition du peuple fyros restait de trouver et d'exterminer le Grand Dragon, qu’ils savaient être à l’origine des grands incendies qui ravageaient le Désert, prémisses de son retour apocalyptique. Bien entendu, Tiralion ne croyait pas au Mythe du Dragon. Il savait simplement flairer les investissements lucratifs et jouer de la corde patriotique. Après tout, il était aussi devenu au fil des années un fin politicien, conseillé et formé par son épouse.
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Pour autant, malgré les pouvoirs octroyés par les cendres draconiques, que le peuple Zoraï nommait aussi particules spirituelles, la plus grande ambition du peuple Fyros restait de trouver et d'exterminer le Grand Dragon, qu’ils savaient être à l’origine des grands incendies qui ravageaient le Désert, prémisses de son retour apocalyptique. Bien entendu, Tiralion ne croyait pas au Mythe du Dragon. Il savait simplement flairer les investissements lucratifs et jouer de la corde patriotique. Après tout, il était aussi devenu au fil des années un fin politicien, conseillé et formé par son épouse.
  
 
Plongé dans ses pensées, et occupé à jouer avec sa longue barbe acajou tressée, Tiralion finissait la seconde lecture du rapport. Un mort de plus, un mort de moins… Après tout, tels étaient les risques du métier ! Satisfait de sa conclusion, il attrapa sa plume d’igara, un parchemin vierge, et rédigea une réponse succincte à son contremaître : la famille de la victime serait généreusement dédommagée. Le Fyros s’appuya sur son bureau pour se lever et s’étira. Ainsi s’achevait sa longue et difficile journée de travail. Caressant son ventre déjà bien rebondi pour son âge, il se demanda ce que le cuisinier avait prévu pour le dîner. Au même moment, la porte s’ouvrit et son épouse entra dans la pièce. Âgée d’environ trente ans, elle était vêtue de la robe de lin rouge traditionnellement portée par les sénateurs, et ses cheveux dorés étaient attachés en chignon.
 
Plongé dans ses pensées, et occupé à jouer avec sa longue barbe acajou tressée, Tiralion finissait la seconde lecture du rapport. Un mort de plus, un mort de moins… Après tout, tels étaient les risques du métier ! Satisfait de sa conclusion, il attrapa sa plume d’igara, un parchemin vierge, et rédigea une réponse succincte à son contremaître : la famille de la victime serait généreusement dédommagée. Le Fyros s’appuya sur son bureau pour se lever et s’étira. Ainsi s’achevait sa longue et difficile journée de travail. Caressant son ventre déjà bien rebondi pour son âge, il se demanda ce que le cuisinier avait prévu pour le dîner. Au même moment, la porte s’ouvrit et son épouse entra dans la pièce. Âgée d’environ trente ans, elle était vêtue de la robe de lin rouge traditionnellement portée par les sénateurs, et ses cheveux dorés étaient attachés en chignon.
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— Je ne sais plus. Tu sais bien que le flux du temps se dilate lorsque je te fixe trop longtemps. »
 
— Je ne sais plus. Tu sais bien que le flux du temps se dilate lorsque je te fixe trop longtemps. »
  
Bélénor ferma les yeux et se massa les tempes. Discuter avec Brandille n’allait pas faire passer sa migraine. Brandille, comme toutes les personnes issues du peuple tryker, était un être de petite taille pourvu d’une peau claire et de traits particulièrement enfantins. Bien sûr, à neuf ans, il n’était pas rare d’être encore pourvu d’un visage de poupon. Mais les Trykers, à l’inverse des Fyros, conservaient une apparence enfantine une fois devenus adultes. Seuls les caractères sexuels secondaires, tels que la pilosité, la voix, les hanches ou la poitrine, témoignaient de la maturité acquise. Bélénor rouvrit les yeux et observa le visage juvénile qui lui faisait toujours face, et qui n’avait pas perdu son air amusé. Il ne put s’empêcher de sourire à son tour. Brandille était sa seule amie. Ou son seul ami, d’ailleurs. Car Brandille n’avait pas de genre défini. Comme ''elle'' le disait souvent ''lui-même'', son identité de genre changeait au gré du vent. Si Bélénor avait pris l’habitude, avec son accord, de la genrer au féminin, la Trykère acceptait tout à fait qu’on le genre au masculin. Brandille se redressa à son tour et s’assit en tailleur sur l’écritoire. Son corps oscillait de droite à gauche.
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Bélénor ferma les yeux et se massa les tempes. Discuter avec Brandille n’allait pas faire passer sa migraine. Brandille, comme toutes les personnes issues du peuple Tryker, était un être de petite taille pourvu d’une peau claire et de traits particulièrement enfantins. Bien sûr, à neuf ans, il n’était pas rare d’être encore pourvu d’un visage de poupon. Mais les Trykers, à l’inverse des Fyros, conservaient une apparence enfantine une fois devenus adultes. Seuls les caractères sexuels secondaires, tels que la pilosité, la voix, les hanches ou la poitrine, témoignaient de la maturité acquise. Bélénor rouvrit les yeux et observa le visage juvénile qui lui faisait toujours face, et qui n’avait pas perdu son air amusé. Il ne put s’empêcher de sourire à son tour. Brandille était sa seule amie. Ou son seul ami, d’ailleurs. Car Brandille n’avait pas de genre défini. Comme ''elle'' le disait souvent ''lui-même'', son identité de genre changeait au gré du vent. Si Bélénor avait pris l’habitude, avec son accord, de la genrer au féminin, la Trykère acceptait tout à fait qu’on le genre au masculin. Brandille se redressa à son tour et s’assit en tailleur sur l’écritoire. Son corps oscillait de droite à gauche.
  
 
« Énor, as-tu rêvé ? Ton sommeil semblait particulièrement agité. »
 
« Énor, as-tu rêvé ? Ton sommeil semblait particulièrement agité. »
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